Air Cocaïne : le procès tant attendu, aura finalement bien lieu !

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L’affaire est en date du 19 Mars 2013, lorsque quatre hommes sont arrêtés sur le tarmac de l’aéroport international de Punta Cana prêts à embarquer direction Saint-Tropez, dans un avion d’affaire. A son bord, 26 valises contenant 700,49 kilos de cocaïne. Retour sur cette première journée aux assises des Bouches-du-Rhône, lundi 18 février 2019.

Lundi 10h – Cour d’Appel d’Aix-en-Provence. La salle est comble. Une horde de journalistes se bouscule pour apercevoir le visage des neuf accusés qui comparaitront ainsi que leurs avocats respectifs. Sur les onze accusés, deux manquent à l’appel. Ce sont les deux passagers prêt à embarquer sur le Falcon 50, l’avion privé transportant les 700,49 kilos de cocaïne, le 19 Mars 2013. Nicolas Pisapia étant toujours détenu en République dominicaine avec assignation à résidence territoriale, et Alain Castany pourtant libre, mais excusé pour raison médicale. Le calme reprend doucement le dessus, sur l’excitation générale qui règne, face à ce procès tant attendu, et si médiatisé. Mais pour les avocats des neuf accusés l’ambiance est tout autre, tels des lions en cage ils semblent prêts à bondir au moindre mot qui sera prononcé par la Cour. Certains trépignent d’impatience, et piétinent nerveusement sous leur bureau, d’autres ne peuvent rester assis et font les 400 pas en attendant le début du procès. La sonnerie stridante de la cour, retentie.

L’audience débute. Le Procureur Monsieur Jean-Luc Tournier prend place suivi de ses 3 assesseurs et du procureur général. « L’audience de la cour d’assises est ouverte, veuillez vous asseoir » s’exclame celui qui trônera durant sept semaines au centre du théâtre judiciaire. Durant près de quinze minutes, il se lance dans un inventaire interminable des quelques cent soixante dix-neuf témoins qui seront présents durant ce long procès. Vient ensuite au tour des neuf accusés de se présenter à la barre. Ils déclinent, tour à tour, leurs identités, leurs adresses et leurs situations professionnelles actuelles. C’est alors que l’on apprend que les deux pilotes mis en cause dans l’affaire, Pascal Fauret et Bruno Odos, ont perdu plus que leur crédibilité dans cette histoire, ils ont également perdu leur travail. L’un est désormais ambulancier, l’autre est conducteur d’engins. Ils risquent trente ans de réclusion pour importation de cocaïne en bande organisée.

« Après cette check-list, on va savoir maintenant si l’on va pouvoir décoller, ou pas « , s’exclame ironiquement le Procureur.

La parole est prise par l’un des cinq avocats de la défense, Maître Cécile Astolfe. « Rien ne se passe normalement, nous n’avons pas de choix, nous sommes dans un avion sans ailes, nous sommes tous confrontés à un problème majeur : l’absence de deux accusés » répond-t-elle au Procureur. Durant une vingtaine de minutes, l’avocate en charge de défendre Monsieur Alcove, l’un des neuf protagonistes de l’affaire, tente de démontrer que ce procès n’est pas équitable. Elle invoque notamment l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme (CEDH). « Nous débutons avec un procès amputé de deux accusés, Monsieur Pisapia et Monsieur Castany »,continue cette dernière. Elle parle au nom des avocats de la défense qui réclament la nullité de l’ordonnance de disjonction prise il y a une semaine par la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence qui confirmait l’absence des deux accusés.  » Ce dossier est bancal et branlant« , affirme l’avocate.

C’est au tour de Maître Antoine Rey, l’un des avocats de la défense, et, associé de Maître Dupont-Moretti, de prendre la parole et de soutenir sa consoeur : « Nous maintenons notre demande de renvoi ». En effet sans les deux accusés, les neuf autres et plus précisément les deux pilotes, peuvent être victimes d’une injustice et donc d’un procès inéquitable. Maître Rey conclu:  » Dans ce dossier il y a un réel problème de forme, les accusés ont été interpellés et détenus dans des conditions déplorables ». » Si le procès se tient on prive les autres accusés d’éléments significatifs puisque la confrontation avec Monsieur Pisapia et Monsieur Castany ne peut avoir lieu », poursuit Maître Rey.

 » La défense ne peut pas s’exercer sans ces éléments » , poursuit l’avocate de la défense

Maître Astolfe défend le fait que les deux accusés aient été à bord du Falcon 50 le soir de l’arrestation et que cela les impliquent directement dans ce procès qui se tiendra durant ces sept semaines. Sans la possibilité de les entendre et de les interroger, cela met en péril l’organisation judiciaire. Elle remet ici en cause le principe d’oralité des débats. Pour finir, elle conteste l’obligation qui pèse sur les neuf accusés d’être présents chaque jour alors que les deux autres seront absents.

Le Procureur prend la parole en demandant à chaque avocat s’ils sont en adéquation avec le plaidoyer de leur consoeur. Les neuf avocats sont d’accord et cela ne fait aucun doute. Puis vient le tour des accusés. Le Procureur leur rappelle l’article 63-1 du Code de procédure pénal qui dispose : « du droit de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ». Le droit au silence.

12H45. La Cour annonce un arrêt de l’audience jusqu’à 15H30 pour délibérer sur la demande en nullité formulée par les avocats de la défense.

15H30. L’audience reprend.

La Cour décide de ne pas statuer immédiatement sur la nullité de l’ordonnance et ne reporte pas l’audience sur les motifs que les circonstances sont insurmontables puisque Monsieur Pisapia est détenu en République Dominicaine sans possibilité de quitter l’île pour la France et au motif sérieux pour le cas de Monsieur Castany, septuagénaire malade, à la santé fragile.

Le procès aura bien lieu.

Aurore Murat


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